• Heureux le loup

     

    Heureux le loup repu, allongeant sa bedaine,

    Dans un lit de genêts, au bord de la fontaine ;

    Il compte les moutons qu’il a déjà mangés,

    Et les pauvres agneaux promptement égorgés.

     

    Il songe à l’avenir, sa pensée est légère,

    Pour un prochain diner, il veut une bergère,

    La fille du hameau au corps appétissant,

    Un repas de gala, menu réjouissant.

     

    Il va se régaler, il salive d’avance,

    La belle a des attraits, excellente pitance,

    Et il se voit déjà du soir jusqu’au matin,

    Jouir de ce bonheur d’un sublime festin.

     

    Mais pendant que le loup rêve à faire ripaille,

    Arrive le fermier qui soudain le mitraille,

    Adieu tendres agneaux, délicieux moutons,

    Fin de cet animal aux appétits gloutons.

     

    On peut toujours rêver mais soyons raisonnables,

    En voulant tout manger et à toutes les tables,

    On risque de mourir d’un empoisonnement,

    D’une crise de foie ou d’un étouffement.

     

     


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  • Le Chêne et les Sangliers

     

    Au cœur d’une forêt, un chêne se dressait,

    Unique spécimen de cette noble essence,

    Rescapé d’un grand vent toujours il produisait,

    A la fin de saison des glands en abondance.

     

    Ses fruits étaient prisés par tous les sangliers,

    Qui venaient se goinfrer de l’aube au crépuscule,

    Ils sortaient de partout, des bosquets, des halliers,

    Guidés par de vieux chefs,  soumis à leur férule.

     

    Les années s’écoulaient, l’arbre se désolait,

    Pas le moindre rejet poussait dans la clairière,

    Les affamés partis, aucun fruit ne restait,

    Tout était avalé, dans l’ombre et la lumière.

     

    -Vous pourriez épargner les glands déjà germés,

    Si je viens à mourir ce sera la disette,

    Vos enfants à venir seront embarrassés,

    Pour trouver des repas avant belle lurette.

     

    Un conseil éclairé qu’aucun ne comprenait,

    Les suidés négligents d’avenir n’avaient cure,

    Le chêne prévoyant souvent leur reprochait,

    De ne jamais penser  à leur progéniture.

     

    Vint alors un printemps où plus un seul bourgeon,

    Ne s’ouvrit au soleil, plus une seule feuille,

    Sur les branches tordues, la désolation,

    Le vieil arbre est mourant et la forêt s’endeuille.

     

    Et quand revint l’hiver les sangliers gourmands,

    Avec bien des regrets fuirent le paysage,

    Honte aux écervelés, à ces imprévoyants,

    Auteurs inconscients de leur propre naufrage.

     


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  • La hyène et les cafards

     

    Dame hyène un beau jour d’orage,

    Dans une grotte s’abritait,

    D’une humeur mauvaise et sauvage,

    Très en colère elle s’exclamait :

     

    -Dis-moi ! Maître du temps qui passe,

    Calme donc ce vilain courroux,

    Car j’ai grand faim et je suis lasse,

    De ne sucer que des cailloux.

     

    Ses yeux s’habituant à l’ombre,

    Elle aperçut, se faufilant,

    Un insecte de couleur sombre,

    Un vieux cafard laid et puant.

     

    Voilà un bien piètre repas,

    Se dit l’animal nécrophage,

    Et si deux ou trois cancrelats,

    Se promenaient dans les parages ?

     

    Bousculant du nez une pierre,

    Il découvrit, bien au secret,

    De quoi emplir une soupière,

    De cafards dodus à souhait.

     

    Etirant de son long la langue,

    Le carnassier fauve et gourmand,

    Avala sans aucune harangue,

    Un plat d’insectes répugnants.

     

    Moralité : Même les hyènes peuvent chasser le cafard.

     

     

     


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  • Le rat et la cigale

     

    Un gros rat s'ennuyait là-haut dans la garrigue,

    Une cigale un jour vint à passer par là, 

    -Dis-moi ma belle enfant, sais-tu danser la gigue?

    L’insecte stupéfait recula de trois pas.

     

    -Allons, réponds-moi donc, ma question t'embarrasse,

    Ou bien  ma grosse voix de stentor te fait peur?

    Je sais que les petits animaux de ta race,

    Chantent, mais sont aussi remarquables danseurs. 

     

    La cigale voulant faire bonne figure, 

    Se redressa soudain et se mit à danser,

    Alors que notre rat dirigeait la mesure,

    Elle tournait, sautait, allant même à chanter.

     

    Le spectacle devint encor plus agréable,

    Les insectes voisins se rapprochant des lieux,

    Chacun contribuait de façon variable,

    Notre rongeur riait, satisfait et joyeux.

     

    Mais cette farandole animant la clairière,

    Attirait les oiseaux, les geais et les pinsons,

    S’abattant sur les proies qui dansaient sans manière,

    Les gourmands se gavaient, dépassant la raison.

     

    Il faut de temps en temps penser à faire la fête, 

    Mais elle endort l’esprit ; les rapaces sachant

    Que les chants et les jeux vous font perdre la tête, 

    Vous êtes dévorés sans aucun jugement.

     

     


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  • Les deux chanteurs

     

    Il était une fois un chanteur à la mode,

    Beuglant n’important quoi, il avait du succès,

    Son agent artistique avait trouvé le code,

    Pour que sur les radios, il passe sans arrêt.

     

    Les journaux, la télé, marchaient dans la combine,

    On ne voyait que lui, il faisait l’Olympia,

    Sur de grandes affiches il avait sa trombine,

    Et on lui proposait aussi du cinéma.

     

    Des thèmes insensés, des paroles débiles,

    Sa voix était fêlée, un timbre de fausset,

    Des intonations faussement juvéniles,

    De la musique à fond c’était là le secret.

     

    Il était une fois un chanteur en galère,

    Il était refoulé, personne n’en voulait,

    Pourtant sa belle voix, aérienne, légère,

    Des textes clairvoyants à merveille chantait.

     

    Surtout n’attendez pas de morale à l’histoire,

    Le premier vit toujours dans la célébrité,

    Le second oublié de toutes les mémoires,

    Végète dans son coin et dans la pauvreté.

     


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  • Une belle pagaille

     

    Il était un pays où fleurissait la rose,

    Dirigé par un roi à l’étrange chapeau,

    Ses sujets l’admiraient, c’était un virtuose,

    Sachant jouer du cor et même du pipeau.

     

    Il avait dans sa cour, tigresses et gazelles,

    Dans ses déplacements, un troupeau d’éléphants,

    Il parvenait toujours à mater les rebelles,

    Et les godelureaux un peu trop arrogants.

     

    Mais tout a une fin, le roi quittait ce monde,

    Laissant désemparés ses proches courtisans,

    Intrigues et complots, des mouvements de fronde,

    Pour remplacer le chef, beaucoup de prétendants.

     

    Parmi les éléphants, c’était la zizanie,

    Que de barrissements au sein des comités,

    Tromperies et ragots, mais aussi calomnie,

    Des votes entachés d’irrégularités.

     

    Profitant du chahut, une belle tigresse,

    Du sceptre s’emparait et narguait les vaincus,

    Son règne durait peu et c’est une bougresse,

    Qui la poussait dehors dans un état confus.

     

    Certains auraient voulu que l’un des pachydermes,

    Parti à l’étranger se porte candidat,

    Mais il avait encor quelques contrats à termes,

    Ce mirifique emploi  ne l’intéressait pas.

     

    Des jeunots assoiffés de gloire et de prestige,

    Jettent leur dévolu sur le trône vacant,

    C’est un tohu-bohu qui donne le vertige,

    A l’homme de la rue à la paix aspirant.

     

     

     


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  • Le chat parvenu

     

    Combien de félidés sont devenus célèbres,

    Depuis le chat botté jusqu’au fameux chat noir,

    Devenir roi du jour et prince des ténèbres,

    Voici ce dont rêvait un minet plein d’espoir.

     

    Il voulait devenir une grande vedette,

    Faire dix fois pas an la une des journaux,

    Etre cité partout dans la moindre gazette,

    Passer à la télé sur les meilleurs canaux.

     

    C’est ainsi qu’on le vit pousser la chansonnette,

    Mais ce fut un fiasco, sa voix ne portait pas,

    Au théâtre insuccès, pire encor l’opérette,

    Il avait échoué, mauvais au cinéma.

     

    Il devint adhérent d’un parti politique,

    Où il fit son chemin car il était menteur;

    Avec son baratin, sa morale élastique,

    Il parvenait bien vite au poste de leadeur.

     

    Il était bien placé pour faire des magouilles,

    Profitant de l’aura auprès des financiers,

    Il était devenu le prince des embrouilles,

    En ayant le feu vert des éminents banquiers.

     

    Ainsi notre matou se trouvait au pinacle,

    Sans avoir étudié, sans avoir travaillé,

    Qui l’aurait supposé, même pas un oracle,

    Pour asseoir son succès, le voici médaillé.

     

     


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  • Pastiches

    Rêve de la rivière

     

    La rivière endormie s’écoule en rêvassant,

    Du fabuleux destin si elle était torrent,

    Descendant les sommets, rapide et furieuse,

    Au gré de ses envies, calme ou tumultueuse.

     

    Agressant les rochers, érodant les galets,

    Ses eaux seraient d’argent, de mille et un reflets,

    Frangées d’écume blanche en démentes cascades,

    Et son cours animé de folles cavalcades.

     

    Formant au fond du lit de vastes tourbillons,

    Des remous délirants aux glutineux bouillons,

    Rongeant de son courant les rives végétales,

    Le ruisseau aurait des allures infernales.

     

    L’homme cet insolent ne pourrait s’y baigner,

    Il risquerait c’est sûr de ne plus remonter,

    Ainsi rêvent la nuit les petites rivières,

    Comme les filles sages aux exquises manières.

     


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  • Un homme pressé

     

    Un homme cheminait d’un pas vif et rythmé,

    Et l’on imaginait que cette vive allure,

    Allait c’est évident bien vite l’amener,

    A destination au bout de l’aventure.

     

    Il fonçait droit au but, allant vers son destin,

    Ignorant la chaleur, ne recherchant pas l’ombre,

    Sans marquer un arrêt, sans quitter le chemin,

    Vêtu d’un long manteau, coiffé d’un chapeau sombre.

     

    Sans détourner la tête, il fixait l’horizon,

    Des traces de sueur perlaient sur son visage,

    Il devrait bien savoir qu’à la chaude saison,

    Il faut pour supporter consommer un breuvage.

     

    Buttant sur un caillou, au sol il s’effondrait,

    Epuisé, assoiffé, manquant de résistance,

    Sans un proche secours, le voyageur mourait,

    Il lui restait encor une longue distance.

     

    Si vous voulez tenir longtemps avec entrain,

    Ne soyez pas pressé, à pied ou en voiture,

    Prenez le temps de vivre, il fera jour demain,

    Rien ne sert de courir, ménagez la monture.

     

     


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  • La lettre Z et la lettre E

     

    Sur un clavier français, deux lettres se suivaient,

    Le  Z de zibeline et le E d’élégant.

    Durant les longues nuits, les voisins discutaient,

    Parlant de tout, de rien, parfois en s’énervant.

     

    -Je suis très important, disait le E altier,

    Bien plus sollicité que vous ma chère amie,

    Les doigts souvent sur moi reviennent se poser,

    Ce n’est pas tous les jours que s’écrit zizanie.

     

    -Vous parlez, vous parlez, savez-vous E vantard,

    Qu’un célèbre écrivain vous a inexploité,

    Disparu vous étiez, un joli tour pendard,

    Votre orgueil je suppose a été contrarié.

     

    -Permettez Z zébu, j’ai aussi deux emplois,

    Je frappe des euros depuis quelques années,

    Vous ne figurez pas dans les jours ni les mois,

    Juste bon aux zéros, aux zones ozonées.

     

    Le clavier était neuf, puis les années passèrent,

    Le E devenait pâle et bientôt invisible,

    Il était moins fringant, ses marques s’estompèrent

    Alors que son voisin était encore lisible.

     

    Pour vivre plus longtemps, il est souvent utile,

    De ne point s’exposer à trop d’engagements,

    Sachez vous ménager, ne soyez pas futile,

    Vous pourrez éviter quelques désagréments.

     

     


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