• Le mouton et le loup

     

    Le mouton c’est connu suit toujours le troupeau,

    Calme, discipliné, marchant tête baissée,

    Il obéit aux chiens, aux cris du pastoureau,

    La moindre déviance est vite repoussée.

     

    Cet animal docile est promptement tondu,

    Par la force imposé à fournir de la laine,

    Son bêlement d’effroi n’est jamais entendu,

    Son maître souverain se moque de sa peine.

     

    Affrontant jour et nuit, les rigueurs de l’hiver,

    L’ovidé résigné subit moult contraintes,

    Parqué dans un enclos, souvent à découvert,

    Il n’ose protester, gardant pour lui ses plaintes.

     

    Mais un jour qu’il venait s’abreuver au ruisseau,

    Il vit sur son chemin un vieux loup solitaire,

    Il courait se cacher derrière un arbrisseau,

    Se dissimulant de l’ennemi légendaire.

     

    -N’aie par peur mon ami, je vais bientôt mourir,

    Je n’ai plus qu’une dent- Le loup ouvrait la bouche,

    -Je reconnais mes torts, je vous ai fait souffrir,

    J’étais considéré comme un être farouche.

     

    Le mouton rassuré s’approchait du mourant,

    Qui soudain bondissait sur cette proie facile,

    D’un seul coup et un seul, il tuait l’imprudent,

    Allait le dévorer dans un endroit tranquille.

     

    Un loup demeure un loup la veille de sa mort,

    Tant qu’il est conscient, il peut commettre un crime,

    Notre pauvre mouton sera toujours en tort,

    Brimé toute sa vie, éternelle victime.

     

     


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  • La dame inconnue

     

    Mes pas crissent sur le gravier de l’allée comme un reproche, je dérange, je n’ai rien à faire dans ce lieu interdit qui n’accueille plus que des fantômes, ceux de ma jeunesse. Et pourtant, le gros marronnier est toujours au même endroit, son feuillage est toujours aussi dense, j’entends le babillage des oiseaux qui le hantent. Je les imagine, sautant de branches en branches,  sifflant des déclarations d’amour. Ce ne sont plus les mêmes, des descendants probablement de ceux qui j’ai entendus chanter, il y a trente ans. Les arbustes tendent leurs branches de chaque côté de l’allée, dans un an, dans deux peut-être, ils auront pris possession de ce passage. La porte en bois qui s’ouvrait sur le sentier menant vers la rivière est collée au sol, je n’ose la bousculer, elle pourrait se désintégrer. Je franchis le mur de pierres par une ouverture provoquée par un effondrement, des parpaings gisent dans les orties…

     

    C’est un visage de femme qui m’apparaît, souriant, agréable. Que m’est-il arrivé ? Il me semble que j’ai trébuché sur l’éboulis.

    Je porte la main à mon front… un pansement.

    -Oui, vous êtes tombé, heureusement, notre jardinier a entendu votre cri.

    Un parfum agréable flotte dans cet endroit, je suis étendu sur un sofa, la dame me prend la main, la sienne est douce.

    -Ne bougez pas, reposez-vous, le traumatisme est léger, mais le sang coulait abondamment.

    Du sang, je résiste à tout, mais j’ai peur de perdre du sang, un mauvais souvenir, la nuit où, dans une ville asiatique, j’ai pris un coup de couteau dans la jambe, je croyais ma dernière heure arrivée, l’artère fémorale touchée. Heureusement, la présence d’un docteur dans ce quartier pourtant mal fréquenté et la longueur de l’arme avaient évité le pire.

    -Que faisiez-vous dans cette broussaille ?

    -C’était la maison de mes grands-parents.

    -Vous êtes le fils de Christophe, c’est évident, vous lui ressemblez ?

    Je ne pouvais qu’acquiescer,  je voyais alors un voile de tristesse passer sur le visage de mon infirmière.

    Je n’osais demander pourquoi cet émoi soudain à l’évocation de mon père, la dame répondait tout de même à ma question.

    -C’était un ami d’enfance, nous nous rencontrions durant les vacances.

    Mon père ! Cet homme froid et austère, comment pouvait-il se lier d’amitié avec une si jolie dame ?

    Je remerciais ma salvatrice et la quittais, je sortais par le portail, elle n’avait pas bougé du perron et me saluait de la main jusqu’à ma disparition.

     

    -Oui, Blandine, naturellement je me souviens, elle est donc revenue des Etats-Unis.

    Mon père regardait à travers la porte-fenêtre du salon, il était ému, je ne l’avais jamais vu ainsi.

    -Nous étions jeunes, nos jardins étaient voisins, mon premier amour, j’y pense encore… j’y pense encore…

    Mes rapports avec mon père ont changé depuis ce jour. 

     

     

     

     

     


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  • La belette et ses amis

     

    Dame belette un jour eut une folie envie,

    En voulant devenir reine de son pays,

    Elle avait les moyens, cultivée et jolie,

    Elle pouvait compter sur ses nombreux amis.

     

    -Quand ils avaient besoin, je me suis dévouée,

    Ils ne sont pas ingrats, ils vont s’en souvenir,

    Je vais les rencontrer, soumettre mon idée,

    Et sans l’ombre d’un doute, ils vont me soutenir.

     

    Elle entreprit alors une longue tournée,

    Visitant les terriers des champs et des forêts,

    Elle espérait ainsi que dans une journée,

    Sa quête de soutien aurait de bons effets.

     

    Barnabé le putois ne fut pas très aimable,

    -J’aimerais bien t’aider mais j’ai trop de travail,

    Refaire ma maison devenue vulnérable,

    Ma famille à nourrir, trois enfants au bercail.

     

    Pas de chance non plus chez madame la fouine,

    -Je regrette vraiment, je n’ai que des malheurs,

    Des huissiers sur le dos, mon logis est en ruine,

    Et pour corser le tout, j’ai d’atroces douleurs.

     

    Le blaireau lui aussi était indisponible

    Même refus poli chez Jim le furet,

    Le loir était au lit, la loutre inaccessible,

    La belette n’avait connu qu’un insuccès.

     

    Il arrive parfois que dans son entourage,

    On ne retrouve plus la solidarité,

    Si quelques faux-amis apprécient le partage,

    La balance devra pencher de leur côté.

     

     


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  • L’âne et le manant

     

    Un âne du Poitou avait perdu son maître,

    Il était mis en vente au marché de Saint-Jean

    Il avait dans l’espoir qu’il verrait apparaître,

    Un homme aussi gentil qu’était le précédent.

     

    Un client s’approchait, examinait la bête,

    Lui tapotait le dos, la croupe et le garrot,

    Soulevant son chapeau, il se grattait la tête

    Puis faisait demi-tour sans avoir dit un mot.

     

    Un autre homme arrivait, retroussait les babines

    De l’âne un peu surpris d’un tel comportement,

    Et puis il enfonçait ses doigts dans les narines,

    Avec brutalité et sans ménagement.

     

    Notre animal souffrait et couchait les oreilles,

    Alors que le manant poursuivait l’examen,

    On n’avait jamais vu de pratiques pareilles,

    Un tel agissement, cruel et inhumain.

     

    L’équidé mécontent avait surtout la crainte

    De plaire malgré lui à cet individu,

    Il cherchait le moyen d’éviter la contrainte

    De servir un goujat, un être aussi tordu.

     

    Mais voici le vilain qui passe par derrière,

    Il reçoit aussitôt un grand coup de sabot,

    Il se retrouve ainsi le nez dans la poussière,

    Traitant son agresseur de sale bourricot.

     

    Il est vrai que parfois, pour tenir à distance,

    Un être malfaisant, importun et grossier,

    Il faut utiliser des moyens sans nuance,

    Sinon les embarras risquent de s’amplifier.

     

     

     


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  • Qui suis-je ?

    Comme aux âges naïfs, je t’ai donné mon cœur,

    C’était le soir tombé quand la lampe s’allume,

    Joyeuse tu étais, moi d’excellente humeur,

    J’oubliais les soucis, le stress et l’amertume.

     

    Et quand le ciel de nuit enfin se dépliait,

    Que le lierre grimpant le long de la muraille,

    Dans le vent du matin doucement s’agitait,

    Mon cœur reprenait vie et chassait la grisaille.

     

    Mon âme se mirait dans le bleu de tes yeux,

    J’ai cru à tout jamais notre joie établie,

    Je vivais des moments tellement merveilleux,

    Et pourtant tu n’étais que ma tranquille amie.

     

    Si l’ombre est à la nuit  le jour est au soleil,

    L’immobile beauté parée de joliesse,

    Eternelle lueur, conquête du sommeil,

    Fut-il ce jour en nous une seule tendresse.

     

    Qu’importent les pourquoi, qu’importe la raison,

    La glycine est fanée et morte l’aubépine,

    Mais beaucoup d’autres fleurs décorent la maison

    Lorsque tombe dehors la neige blanche et fine.

     

    Si nos cœurs ont brûlé en des jours exaltants,

    Dans le calme jardin où plus un arbre bouge,

    Les brumes et les frimas ont chassé les enfants,

    Elle est seule à présent l’escarpolette rouge.

     

    Les granges et les greniers se sont chargés de foin,

    Les récoltes sont faites et il reste les chaumes,

    Les complaintes du soir s’entendent de si loin,

    Qu’elles ressemblent à la litanie des psaumes,

     

    Voilà, le soir tombé, la lune devient or,

    Disparaissent des yeux les collines boisées

    Les arbres du verger se distinguent encor,

    Mais l’ombre se répand dans le creux des vallées.

     

    Comme le précédent titres-mêlés, il s'agit de découvrir un auteur. Aucune proposition pour le précédent ? Seriez-vous lectrices et lecteurs, "timides"? Merci de me lire.

     


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